laparostomie de Bogota ou « Bogota bag », dispositif temporaire de fermeture de l’abdomen après décompression pour syndrome compartimental abdominal
Le syndrome du compartiment abdominal est une hypertension abdominale d’évolution rapide avec pour conséquences une défaillance polyviscérale et une mortalité importante. Il survient après des traumatismes, des sepsis, une ischémie et globalement après tout processus abdominal et présence de liquide en excès intrapéritonéal ou viscéral. Le traitement d’urgence est une décompression chirurgicale qui pose rapidement le problème de la fermeture abdominale.
La définition exacte est une valeur de pression abdominale au delà de 15 à 20 mm Hg associé à des défaillances viscérales (rénale, hémodynamique, gastro-intestinale, respiratoire ou neurologique). Elle est souvent dûe à une augmentation rapide et incontrôlée du volume des viscères abdominaux qui crée une hyperpression intra-abdominale. Elle s’observe dans des situations variées, mais classiquement en traumatologie abdominale ou en post-opératoire digestif.
A l’état physiologique cette pression est proche de 0 mais elle peut s’élever au cours de phénomènes tels que vomissements, défécation, exercice physique. Sur un effectif de patients médicaux hospitalisés pour pathologie extra-digestive, les mesures de pression retrouvaient en moyenne 6,5 mm Hg [0,12-16].
Les conséquences cliniques sont observées car les parois extérieures de l’abdomen n’étant pas extensibles à l’infini, le contenu abdominal devenu trop volumineux comprime les structures vasculaires entrainant un obstacle au retour veineux ainsi qu’une ischémie des artères de moyen et petit calibre.
La mécanique ventilatoire est perturbée par altération de la cinétique diaphragmatique.
Conséquences :
L’examen clinique est souvent rapide dans ce genre de situation, sur une distension abdominale importante voire monstrueuse et qui n’évoque pas un météorisme abdominal comme pour un volvulus du colon sigmoïde par exemple. Si le patient est conscient, la douleur abdominale est majeure, le patient toxique voire déjà choqué, avec des troubles respiratoires et/ou hémodynamiques, des troubles de conscience rapidement évolutifs, d’autant plus marqués que le patient a de multiples antécédents.
Il y a un manque de consensus sur des signes cliniques clairs diagnostiques, aussi devant la moindre suspicion, une mesure de pression abdominale doit être réalisée en particulier dans les contextes à risques.
Difficile il n’y en a pas vraiment, puisque toutes les situations précédentes peuvent donner une hyperpression abdominale. Le syndrome douloureux peut être lié à ces différents processus avant la phase d’élévation de pression abdominale. Citons de façon anecdotique, les douleurs aiguës intenses liées aux coliques néphrétiques où l’abdomen peut paraître tendu, le globe vésical et les douleurs abdominales au décours de la grossesse (plus accessoirement les douleurs aiguës sur kystes ovariens massifs).
Il n’y a pas grand chose à attendre de la radiographie standard (à part un pneumopéritoine ou des niveaux hydro-aériques d’occlusion), et donc pas non beaucoup de l’échographie aux urgences. La détection de l’hémopéritoine est rapide, simple et sensible, la visualisation d’un anévrisme de l’aorte abdominale est possible chez les sujets pas trop corpulents, mais la confirmation de la rupture nécessite des appareils très performants. Les occlusions intestinales peuvent montrer soit des artefacts aériques soit des images de dilatation importante des anses grêles. Mais aucune de ces images n’est liée directement au syndrome compartimental, on peut juste espérer que des images d’hémopéritoine ou d’ascite massive ou de dilatation grêle monstrueuses évoquent déjà ce diagnostic. Il n’y a pas de moyen direct de mesurer la pression intra-abdominale par échographie.
Le scanner est l’élément clé du diagnostic des traumatismes de l’abdomen stables, sans passage au bloc opératoire direct, et donne le bilan lésionnel précis. Il peut montrer une distension massive du contenu abdominal, une compression des veines rénales, de la veine cave inférieure, l’épaississement oedémateux des parois intestinales, les signes occlusifs et l’épanchement péritonéal. L’importance des images au scanner fait évoquer le diagnostic mais ne le donne pas de manière spécifique.
La pression intra-abdominale n’est pas évaluée en routine par mesure directe du contenu abdominal comme par une ponction péritonéale bien qu’elle ait été étudiée.
Elle est réalisée plus simplement (mais avec des critiques) par mesure de la pression intra-vésicale, au moyen d’une sonde urinaire de Foley. D’autres méthodes endocavitaires (gastrique, rectale, vaginale) ont été proposées mais n’ont pas été retenues.
Normalement cette pression est mesurée < 10 mm Hg, mais en cas de syndrome compartimental elle excède facilement les 25 mm Hg.
techniquement un système de prise de pression est connecté à une poche de 500 ml de soluté isotonique de NaCl placée dans une poche de contre-pression. Un angiocathéter de calibre 18 gauges est inséré dans la membrane de prélèvement située sur la ligne de recueil des urines, laissant en place le cathéter en plastique dirigé vers la vessie. La ligne de recueil des urines est clampée en aval du cathéter. L’adaptation d’une seringue graduée de 50 ml permet de remplir la cavité vésicale avec 50 ml de soluté isotonique de NaCl. Le système est secondairement purgé de manière à former une colonne liquide. Le zéro de la tête de pression est réalisé avec la pression atmosphérique à hauteur de la symphyse pubienne. Chez le patient ventilé, les variations ventilatoires entraînent une oscillation de la courbe de PIA. La valeur à considérer n’est pas consensuellement ad-mise : valeur moyenne ou valeur télé-expiratoire. En pratique, les patients présentant un réel SCA ont de telles diminutions de la compliance abdominale que les oscillations sont négligeables et seule la valeur moyenne est considérée.
L’étude du pH intramuqueux digestif serait intéressante.
Le traitement associe une levée de la pression abdominale par voie chirurgical et un conditionnement réanimatoire des défaillances multi-viscérales.
Dans la zone d’incertitutde, au-delà de la pression normale, entre 10 et 15 mm Hg, l’objectif est le maintien de la volémie, entre 15 et 25, il faut une expansion volémique systématique.
Au-delà de 25 mm Hg, la réanimation doit être associée à la chirurgie en urgence, et même une réexploration systématique au-delà de 35 mm Hg.
Le remplissage excessif semble cependant nuire au syndrome compartimental. Il faut monitorer la pression intra-abdominale pour guider au mieux les perfusions.
Le traitement restant mal codifié, d’autres thérapeutiques sont en cours d’évaluation : curarisation systématique, aspiration digestive, hémofiltration …
Le traitement radical est la décompression chirurgicale qui lèvera la pression intra-abdominale. Ceci se réalise le plus souvent par laparotomie écourtée et laissera l’abdomen ouvert sans fermeture primitive. On parle aussi de laparostomie.
Les indications varient selon les situations :
Le problème de laisser un « Abdomen ouvert » est évidemment un risque septique important. L’oedème des viscères ne permet pas toujours d’envisager une fermeture différée rapide, aussi des techniques et systèmes de protection de l’abdomen via des systèmes de fermeture temporaire de l’abdomen ont été développés.
Des dispositif avec prothèses mesh (à l’image des prothèses utilisées pour les hernies) sont utilisables et paraissent plus efficaces que le dispositif improvisé du « Bogota bag » qui consistait à coudre un sac plastique d’irrigation pour créer une fausse paroi de protection. L’avantage de ce dernier est un coût très faible comparé aux prothèses herniaires, et une disponibilité facile dans les pays en voie de développement.
La suture dynamique en tension (dynamic retention suture) a été essayée un peu sur le principe de fermeture différée au niveau des membres en post chirurgie de syndrome des loges.
Les systèmes d’aspiration en pression négative des plaies (système VAC, pansement pariétal aspiratif, Vacuum pack …) donnent les meilleurs résultats, de même que le Wittmann patch (système de prothèse avec ancres). Le traitement par pression négative d’une laparostomie a aussi pour but de limiter la rétraction des berges musculo-aponévrotiques pour aider à la fermeture, il a l’avantage de drainer les exsudats et de faciliter les soins car le dispositif est occlusif et étanche.
Laparostomie selon Bogota, Manuel de chirurgie humanitaire, Lavoisier
Le syndrome compartimental abdominal, mise au point , Fiche sur la mesure de pression intra-vésicale , SRLF
Le syndrome du compartiment abdominal , MAPAR
Le syndrome du compartiment abdominal ou le SCA des chirurgiens , Le médecin du Québec
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Pas mal d’images sur le site de Starsurgical et une vidéo explicative
le time lapse de la peinture du Bogota bag
système ABBRA
système VAC abdominal
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Merci bien!