luxation sternoclaviculaire postérieure gauche, patient légèrement penché épaules en avant pour faire saillir les clavicules, celle de gauche ne ressort pas, luxée derrière le manubrium sternal
L’atteinte de l’articulation sterno-claviculaire est une lésion très rare, elle est à la jonction entre la chirurgie orthopédique et la chirurgie thoracique. L’articulation est complexe, elle comporte une articulation synoviale entre la clavicule et le manubrium sternal, mais la mobilité est assez réduite.
Sommaire
Elle comporte un ménisque fibrocartilagineux entre les 2 surfaces articulaires. Des structures extra-articulaires réduisent encore les mouvements, il s’agit de la première côte et du ligament costo-claviculaire, du muscle sous-clavier et des insertions tendineuses du sterno-cléïdo-mastoïdien. La complication dangereuse est la luxation en arrière du manubrium sternal vers le médiastin supérieur (dôme pleural, artère et veine sous-clavières, plexus brachial), même si cette lésion est encore plus rare que la luxation antérieure.
Le mécanisme à l’origine de la lésion concerne soit un choc direct sur le moignon de l’épaule transmettant sa force à la clavicule, soit un choc direct antéro-postérieur directement sur l’articulation. Ces lésions peuvent se voir dans les traumatismes à haute énergie comme les accidents de voiture, ou dans les sports de combat.
La luxation antérieure pose un problème plus esthétique que fonctionnel. La saillie de la clavicule est visible et palpable.
La luxation postérieure est plus douloureuse, à risque compressif et en plus de la douleur, on peut voir une dyspnée, une dysphagie, une dysphonie. Le côté du sternum paraît proéminent et palpable.
La douleur s’exacerbe à la compression latérale des épaules et dans le decubitus dorsal. L’épaule peut paraître plus courte du côté de la lésion et maintenue en attitude antalgique présentée vers l’avant.
Des complications à type de syndrome du défilé thoraco-cervico-brachial (ancien défilé des muscles scalènes), de détresse respiratoire aiguë (notamment par pneumothorax), de syndrome cave supérieur, et de lésions du plexus brachial ont été décrites.
Les radiographies osseuses sont difficiles à interpréter. Il faut réaliser un cliché de face en inclinaison, patient en decubitus dorsal. En situation physiologique les 2 clavicules sont alignées et parallèles au sommet du manubrium sternal. En cas de luxation il y a perte de l’alignement : luxation antérieure, l’extrémité sternale de la clavicule parait surélevée tandis que postérieure elle parait abaissée.
La radiographie du thorax de face ne visualise pas cette lésion mais peut détecter des fractures associées, un pneumothorax, qui reste néanmoins souvent sous-estimé quand il est partiel. L’échographie peut être utile pour qui sait la maîtriser pour repérer un petit pneumothorax apical ou une rupture de la corticale. L’aspect asymétrique peut aider au diagnostic de suspicion de disjonction mais ne peut le confirmer pleinement.
En cas de suspicion de luxation non évidente sur le 1er bilan, c’est le scanner thoracique qui fera le diagnostic. Il est à demander en urgence dans une luxation postérieure pour visualiser une compression du médiastin, un pneumothorax.
Le diagnostic différentiel se pose surtout pour une fracture du sternum au manubrium, plus fréquente que les disjonctions sterno-claviculaires. La déformation peut correspondre à une fracture de la clavicule au 1/3 ou 1/4 interne. Le problème étant que cette dernière fracture peut être associée à la disjonction ou une fracture de la 1ère côte.
On trouve aussi rarement une fracture du 1/4 externe de la clavicule associée à la disjonction sterno-claviculaire, en « clavicule flottante » (floating clavicle).
L’entorse de l’articulation sans rupture ligamentaire et donc sans déplacement repose sur une prise en charge antalgique et fonctionnelle avec une immobilisation courte (anneaux de Delbet, écharpe du membre supérieur) et rééducation rapide.
La réduction de la luxation antérieure sous analgésie-sédation repose sur une pression directe de l’extrémité acromiale. Une immobilisation la suivra dans la majorité des cas. Elle est probablement assez peu pratiquée, déjà parce que le diagnostic n’est pas forcément fait au jour du traumatisme, d’autre part, par crainte sans doute de pression trop marquée et d’entrainer une fracture ou une lésion postérieure.
Le traitement chirurgical concerne les échecs de réduction ou les récidives car celles-ci sont fréquentes, à partir du moment où le patient est symptômatique, ce qui en pratique est assez rare.
La réduction de la luxation postérieure doit se faire rapidement avec une équipe spécialisée prête à intervenir chirurgicalement. Elle associe un mouvement de traction à une abduction ou au contraire une adduction. La fixation chirurgicale emploie divers procédés avec parfois résection de l’extrémité interne de la clavicule et système d’amarrage au sternum.
La luxation complète de la clavicule (luxation panclaviculaire) est exceptionnelle, toujours associée à des lésions vasculaires et neurologiques.
A distance, une arthrose précoce est notée dans les luxations antérieures.
Des luxations non réduites, chroniques existent et peuvent bénéficier d’un traitement chirurgical.
Meyer F, Upper extremity and hand injury, Trauma by Moore Feliciano Mattox, McGraw Hill editions
Campbell C, Sternoclavicular dislocation, Greenberg’s text atlas of emergency medicine, Lippincott Williams & Wilkins editions
Aswad LR, Sbihi A, Dumontier C, Luxation postérieure sterno-claviculaire , Maitrise orthopedique
A lire également sur LITFL une grande synthèse avec cas clinique, imagerie explicative et un peu d’historique des premières descriptions par Sir Astley Paston Cooper, ainsi que de nombreuses références bibliographiques :
Cadogan M, Sternoclavicular dislocation , Life in the fast lane
Sternoclavicular dislocation , Radiopaedia
Sternoclavicular Joint Dislocations: Diagnosis and Treatment , ALiEM
Anterior sternal dislocation, Images in clinical medicine, NEJM
Pubmed :
The use of bedside ultrasound to diagnose posterior sterno-clavicular dislocation (abstract)
Surgical treatment of chronic dislocation of the sterno-clavicular joint
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