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Alexander Fleming et la découverte de la pénicilline

Sir Alexander Fleming

Sir Alexander Fleming

Le nom d’Alexander Fleming est associé à la naissance d’une classe de médicaments qui allait révolutionner le XXe siècle : les antibiotiques, avec la pénicilline. Et dire que cette découverte est le fruit du hasard …

Biographie

Fleming est né le 6 août 1881 en Ecosse, il est le benjamin d’une fratrie de quatre enfants.
Enfin plutôt huit si on compte quatre autres enfants que son père eut d’un premier mariage. Père que Fleming n’eut pas le temps de bien connaître puisqu’il mourut alors que le jeune Alexander n’avait que sept ans.

Il poursuivit ses études à Londres pour y rejoindre certains de ses frères. Parmi eux, Tom, qui était ophtalmologiste, le pousse à tenter les études médicales. Il entre ainsi en 1906 au laboratoire d’Amroth Wright, mais parallèlement il complète un parcours clinique et il est titularisé chirurgien en 1909.

Fleming se fait un nom par un traitement original de la syphilis par le Salvarsan (arsphénamine, un composé chimique à base d’arsenic, qui sera longtemps un traitement de la trypanosomiase) qu’il met au point en 1910, et administre par voie veineuse (voie peu utilisée encore). Cette maladie incurable à l’époque fait des ravages dans tous les milieux, et est considérée comme une fatalité.

Pendant la première guerre mondiale, Fleming sert au sein du service de santé de l’armée britannique. Au sein de l’équipe de Wright basée à Boulogne, il recueille un grand nombre de données qui serviront d’articles portant sur l’emploi des antiseptiques sur les blessures de guerre.

Après le conflit, il évolue progressivement vers la biologie et la bactériologie, en 1928, il est professeur à l’Hôpital Sainte-Marie.

Avant la pénicilline

De ses observations au cours de la première guerre, Fleming conclut que les antiseptiques ne sont pas une solution au problème des plaies de guerre voire aggravent ces lésions. Lui et son équipe sont convaincus que ces liquides agissent efficacement mais sans distinction entre des germes véritablement pathogènes et d’autres relativement inoffensifs voire protecteurs.
Mais évidemment à cette époque, ces résultats ne suffisent pas à changer les pratiques.

Pratiques qui ont la vie dure, puisqu’aujourd’hui encore, il est parfois difficile de freiner certains soignants qui pensent stériliser totalement une plaie par des désinfectants alors qu’ils ne font que surajouter une brûlure chimique.

Dans les travaux de microbiologie, Fleming cherche à développer des vaccins, notamment pour la grippe. A cette époque on ne sait pas encore que son origine est virale, et Fleming est même convaincu que c’est une bactérie qui la déclenche.
Dans l’erreur qu’il s’entête à développer en preuve scientifique il en découvre pour autant le fait que certaines sécrétions biologiques (rhinopharyngées, larmes, …) ont un effet bactériolytique. Il pense qu’une protéine qu’il appelle lysozyme est responsable de cette action.
Il n’y aura pourtant pas d’application thérapeutique.

La découverte de la pénicilline

Dans les années 20, Fleming est une autorité médicale reconnue en microbiologie, et il s’occupe de plusieurs travaux notamment sur les staphylocoques. Mais il n’a pas la réputation d’être très organisé, et on rapporte un certain désordre dans son laboratoire.

En particulier lors d’un retour de vacances en 1928 qui avaient laissé quelques cultures bactériologiques à l’abandon, une partie de son travail est altéré, visiblement colonisé par un champignon.

Dans une certaine mesure, la recherche entreprise aurait pu être stoppée, et toutes les boîtes de Pétri auraient fini à la poubelle. Il essaie de sauver ces boîtes en les plaçant dans une solution désinfectante pour tuer le champignon.
Parmi celles qui ne sont pas complètement imbibées de liquide, certaines laissent voir une  anomalie assez curieuse : autour du champignon il existe une zone où les bactéries mises en culture ne se sont pas développées.
Ce fait à une époque de développement de la bactériologie n’était pas si facile que ça à interpréter compte tenu de l’aléa expérimental. Hormis les antiseptiques, on ne connaissait pas de substances capable d’inhiber la croissance des bactéries (bactéries qu’on ne connaissait pas depuis un siècle non plus).
Fleming isole le champignon, du groupe Penicillium et appelle l’agent inhibiteur Pénicilline.

Il n’est pas pour autant le «père de la pénicilline» puisque déjà dans l’Antiquité, certains végétaux étaient utilisés après leur décomposition pour traiter des plaies et des panaris.
Le grand chirurgien anglais Joseph Lister en 1871 constate que des urines contaminées par le champignon Penicillium ne sont plus un milieu propice au développement des bactéries. Il soignera même une infirmière avec une préparation de ce type.

En 1897, Ernest Duchesne, un français propose un travail de thèse sur la concurrence vitale chez les micro-organismes. Il avait constaté une interaction entre Escherichia coli et Penicillium. Mais Duchesne qui demandait des crédits à l’armée pour poursuivre ses recherches ne les obtiendra jamais, et il se détournera du chemin des laboratoires.
Par la suite Duchesne connaitra un destin tragique, malade des poumons, il décèdera en 1912.
On relate de nombreux faits similaires d’inhibition de croissance bactérienne par des moisissures, mais les applications pratiques sont très ponctuelles et aucun ne semble comprendre le phénomène.

30 ans après Duchesne et sans avoir basé les travaux sur ses recherches, Fleming isole un agent spécifique antibactérien, qu’il teste contre le staphylocoque et nombre d’agents infectieux connus à l’époque.

Une découverte qui tarde à s’appliquer

Ses premières publications ont peu d’écho, la culture de penicillium est difficile. Des problèmes de production en grande quantité de la pénicilline risquent de se poser.
Fleming commence à considérer cet agent comme quelque chose de secondaire dans l’infectiologie.
En 1935, un bactériologiste allemand Gerhard Domagk qui travaille sur l’efficacité antibactérienne des colorants chimiques, découvre que l’un d’eux est actif sur les streptocoques. Cette substance est isolée, et de nombreux analogues vont être synthétisés par les français Jacques et Thérèse Tréfouël, ils vont constituer la famille des sulfamides antibactériens. Dogmak reçoit le prix Nobel de médecine en 1939 mais le régime nazi l’empêche de chercher son prix.
Le système de production chimique est idéal pour l’industrie pharmaceutique, qui peut produire en grande quantité ces produits, la culture de produit de moisissure est donc reléguée au second plan.

Mais la deuxième guerre mondiale va changer la donne. Jusqu’en 1940, la substance n’est pas considérée autrement qu’une curiosité de laboratoire.
Mais la difficulté de traitement des plaies infectées va pousser à aller au-delà des sulfamides, qui font également courir des risques allergiques, hématologiques et rénaux.
Ce sera grâce à plusieurs hommes, Chain, Florey, Heatley, et de nombreux laborantins d’Oxford que l’isolement, la concentration et la stabilisation de la structure permirent la production en masse et la distribution.

Après la gloire

Fleming est annobli et devient Sir Alexander Fleming, et reçoit le prix Nobel de physiologie et de médecine avec Howard Florey et Ernst Boris Chain.

Fleming continuera ses travaux sur le développement des antibiotiques, il dirige le Wright Fleming Institute jusqu’à sa retraite en 1954. Wright et lui envisageront déjà le concept de résistance bactérienne par la perte d’efficacité des pénicillines quand elles étaient mal utilisées par le biais d’enzyme bactérienne, les pénicillinases.

Il décède d’une crise cardiaque le 11 mars 1955 à Londres.

La pénicilline, premier véritable antibiotique avait été découvert de nombreuses fois, mais jamais véritablement compris. Sa redécouverte dûe au hasard et un peu de négligence de chercheur a failli ne rester qu’une publication jamais appliquée.
Il aura fallu une autre guerre mondiale et ses légions de blessés pour stimuler son développement et sa distribution.
L’histoire des antibiotiques  trouve en cet épisode cocasse un sujet propice à bâtir une légende très humaniste.

Malheureusement une sombre affaire a été révélée il y a peu de temps faisant état d’une expérimentation du gouvernement américain entre 1946 et 1948 sur des centaines peut être des milliers de personnes au Guatemala. On a inoculé la syphilis à des marginaux, des prostituées et de malades mentaux à leur insu pour étudier l’efficacité de la pénicilline dans le traitement de cette maladie sexuellement transmissible.
Le gouvernement américain de Barack Obama formulera des excuses publiques au Guatemala plus de 60 ans après ces évènements.

Sources et références à consulter :

sur Wikipedia : Alexander_Fleming et Découverte_de_la_pénicilline

Fleming sur medarus.org

Fleming sur herodote.net

concernant le scandale du Guatemala :

http://fr.euronews.net/2010/10/02/le-mea-culpa-des-etats-unis-au-guatemala/

http://www.lefigaro.fr/international/2010/10/02/01003-20101002ARTFIG00344-experimentations-washington-s-excuse-aupres-du-guatemala.php

Voir aussi sur le site :

Septicémie, sepsis sévère et choc septique

Erysipèle et dermo-hypodermites infectieuses

Chancre, érosion et ulcération des muqueuses génitales

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