thoracotomie

petite encyclopédie de l'urgence

Traumatismes fermés du rein

traumatisme rein hematome

pièce autopsique montrant un volumineux hématome du rein avec atteinte de la voie excrétrice

On considère que moins de 10% des patients victimes d’accidents violents sont porteurs de lésions de l’appareil urinaire. Les lésions du rein sont les plus fréquemment rencontrées dans les traumatismes urologiques. Elles ne sont pas forcément parlantes sémiologiquement, sont parfois de découverte fortuite sur l’imagerie d’un polytraumatisé. Pour certains auteurs, parmi toutes les atteintes viscérales, les contusions du rein viennent en 3e position après les contusions du foie et de la rate. Assez peu de ces contusions nécessiteront une intervention chirurgicale ( < 15%).

Classifications

Selon que le traumatisme est inclus ou non dans un polytraumatisme, la présentation et la prise en charge du blessé seront différentes. 3 éléments peuvent être atteints schématiquement : le parenchyme rénal, la voie excrétrice et le pédicule vasculaire rénal.

Il existe une ancienne classification dite de Chatelain (il existe une classification pour tout) qui décrit différentes contusions rénales en fonction de leur gravité.

  • I : l’atteinte est partielle, la capsule est intacte a : la fissuration atteint la voie excrétrice b : la fissuration ne l’atteint pas
  • II : la capsule est rompue, il existe un hématome de la loge rénale voire un urohématome a : la voie excrétrice est rompue b : elle ne l’est pas
  • III : contusion grave avec éclatement du rein, atteinte de la voie excrétrice par la force des choses, urohématome périrénal et rétropéritonéal
  • IV : lésion particulière, rupture du pédicule vasculaire rénal, hématome de constitution très rapide, volumineux rétropéritonéal, ischémie du rein

Une classification américaine décrit plutôt 5 types de lésions :

  • type 1 : contusion avec hématome sous-capsulaire mineur
  • type 2 : lacération corticale sans atteinte de la voie excrétrice
  • type 3 : lacération corticale majeure atteignant la voie excrétrice ou la médullaire profonde
  • type 4 : lésion vasculaire (comprenant les éclatements du rein)
  • type 5 : rupture de jonction pyélo-urétérale

Diagnostic

Les signes cliniques observables seront donc liés à l’atteinte d’un ou plusieurs des 3 éléments constitutifs du rein. Les signes fonctionnels sont limités au cas du sujet conscient ayant reçu un traumatisme isolé de la fosse lombaire, qui peut donc le décrire et décrire sa douleur. Mais même dans ce cas, la douleur peut être diffuse ou associée à une réaction de défense abdominale globale, un iléus réflexe. Chez un patient comateux, polytraumatisé, on ne peut pas compter sur ces données. Les signes physiques comme une ecchymose ou une lésion cutanée post-traumatique de la région lombaire sont précieux mais ils sont assez rares. A moins d’un énorme urohématome, on ne voit pas spécifiquement de déformation de la fosse lombaire. La présence de fractures à l’arc postérieur des dernières côtes est en faveur de lésions rénales mais aussi hépatiques et spléniques.

L’hématurie qui concerne les contusions avec lésion de la voie excrétrice ne sont pas forcément macroscopiques et doivent être recherchée sur les bandelettes urinaires. L’hématurie microscopique ne témoigne pas forcément d’une lésion grave. On considère que la pratique des bandelettes urinaires systématique en cas de traumatisme lombaire n’a pas de valeur diagnostique ni d’exclusion. Si la lésion rénale n’est pas diagnostiquée, en cas d’atteinte de la voie excrétrice, il se constituera un épanchement d’urineou urinome périrénal ou rétropéritonéal qui peut vite s’infecter.

La lésion de type IV n’a pas de particularités cliniques hormis que l’hématome est de constitution très rapide vu le débit sanguin rénal, c’est un tableau d’hémorragie interne évolutif rapidement. L’ischémie du rein par rupture de son pédicule ne peut être parlant que si le rein controlatéral est absent ou non fonctionnel. L’insuffisance rénale risque alors d’être dramatique. Le pronostic peut être modifié en cas de malformation rénale, et surtout de la valeur fonctionnelle du rein controlatéral. Chez l’enfant dont le rein est plus mobile, les lésions sont souvent plus graves.

Examens complémentaires

L’imagerie est fondamentale pour le diagnostic précis, du plus simple via l’échographie, au plus complexe l’artériographie, en passant par le scanner et l’urographie intraveineuse. Les examens biologiques urinaires précis comme un ECBU n’ont pas d’intérêt et la numération formule sanguine ne permet pas de suivre avec précision la déglobulisation en cas de gros hématome.

Echographie

L’échographie est facilement réalisable, reproductible, mais peu précise. Elle peut bien visualiser le parenchyme, un hématome sous-capsulaire strict, un hématome périrénal, mais elle ne peut visualiser la rupture de la voie excrétrice. Le Doppler des artères rénales peut voir une interruption du flux sanguin mais en général on voit déjà un hématome interne (sauf en cas de plaie artérielle sèche, ou d’attrition vasculaire sans constitution d’hématome).

L’échographie fait de toutes façons partie des premiers examens paracliniques en cas de suspicion d’hémopéritoine.

cas n°1 : lacération du pôle inférieur du rein et hématome péri-rénal

épanchement périrénal bien visible chez un enfant de 9 ans

rein augmenté de taille, déformé, structure habituelle non reconnaissable : hématome rénal volumineux

rupture traumatique d’un volumineux kyste rénal et épanchement périkystique

Scanner

La TDM et même l’uroscanner (qui lui associe une UIV) est devenue un examen incontournable dans les traumatismes abdominopelviens, et les scanners de dernière génération permettent une analyse corps entier dans les polytraumatismes, de manière rapide et fiable.

Les lésions vasculaires ne sont finement analysées que par artériographie d’abord globale pour visualiser la vascularisation hépatique et splénique, puis sélective sur les reins. Elle ne concerne cependant que les traumatismes les plus graves.

La scintigraphie au DMSA a été proposée pour apprécier l’état de la vascularisation du rein et aussi la récupération fonctionnelle des zones contuses. Cet examen n’est pas possible dans les centres qui ne disposent pas d’un service de médecine nucléaire, mais les scintigraphies sont parfois très faciles à obtenir en urgence (bien plus que les échographies …).

scanner du cas n°1 : lacération du pôle inférieur du rein droit et hématome périrénal

hématome sous capsulaire du rein gauche déplaçant le cortex, sonde double J en place

lésion de grade V du rein gauche

hématome péri-rénal gauche post traumatique

lésion rénale gauche sévère avec formation d’un urinome en phase tardive de scanner

Traitement

La majeure partie des contusions du rein ne nécessite pas de traitement particulier, même en cas d’hématome périrénal, il peut être préférable de le surveiller en reproduisant les TDM.

Les indications à une chirurgie rénale en urgence sont l’existence d’un hématome ou urohématome périrénal important croissant expansif, ce qui n’est pas la règle puisque la plupart du temps l’hématome finit par «tamponner» sur quelques heures dans la loge rénale. L’artériographie peut permettre dans certaines conditions un geste radiologique d’embolisation pour tarir le saignement. Quand elle n’est pas possible et qu’une intervention est souhaitable, l’opération est une laparotomie large plutôt qu’une voie élective.

Les lésions sévères du rein, broyé feront recourir à une néphrectomie totale d’hémostase, si elles s’inscrivent dans un tableau de choc hypovolémique par spoliation sanguine. Mais certaines lésions de type III ont de façon surprenante «bien» guéries avec abstention chirurgicale et surveillance simple.

Les lésions du pédicule rénal si elles sont complètes justifieront une néphrectomie totale, le rein ne supportant pas en général une ischémie plus de 45 min. Si elles sont incomplètes ou si l’artère rénale est thrombosée ce qui entraine une ischémie progressive, il faut refroidir d’abord le rein puis procéder à la réparation chirurgicale du pédicule.

L’hématome rétropéritonéal doit être respecté s’il est de faible taille, sinon s’il dissèque largement le rétropéritoine, il faudra le traiter après contrôle du pédicule vasculaire rénal.

Une chirurgie rénale secondaire à partir du 6e jour, ce qui laisse le temps à l’hémostase naturelle de se faire, est possible. Elle se fait par lombotomie ou laparotomie (rarement par coelioscopie), et réalise soit un drainage simple de l’hématome périrénal ou sous-capsulaire important, compressif, soit une réparation de la voie excrétrice. Cette dernière doit être toujours réalisée, les hématomes ou urohématomes ont tendance à évoluer vers une fibrose rétractile.

Références

Traumatismes urologiques par E. Van Glabeke, M.-O. Bitker, Traumatismes graves sous la direction de L.Beydon, P. Carli, B. Riou, éditions Arnette

Renal trauma , Radiopaedia

Imaging in renal trauma

Imaging in Kidney Trauma , Medscape Reference

Renal trauma , Ultrasoundcases

Médias

Présentation sur les traumatismes du rein et leur imagerie

2 commentaires sur “Traumatismes fermés du rein

  1. ben
    13 avril 2015

    un hématome sous formes de graisse dans le rein gauche est ce que il faut une eopération pour l enlever

    • Tom O'Graphy
      13 avril 2015

      Si c’est un hématome en dehors du rein, dans la graisse périrénale, s’il est de petite taille, qu’il n’y a pas de rentissement particulier (pas de compression de la voie urinaire, ni des vaisseaux nourriciers), qu’il semble non expansif dans le temps, très probablement il n’est pas à opérer. Après tout dépend du bilan précis, angioscanner ou artériographie, du terrain, des traitements anticoagulants ou non …

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