Il est classique de distinguer les angines en fonction de l’aspect macroscopique des lésions en angines érythémateuses, érythémato-pultacées, pseudo-membraneuses, ulcéro-nécrotiques et vésiculeuses.
Ces angines sont rares et peuvent être de nature infectieuses par association bactérienne, la révélation d’un chancre syphilitique, ou le témoin d’un processus tumoral (carcinome épidermoïde et hémopathies).
La distinction entre les 2 dernières catégories tient sur le fait que l’ulcération est d’entrée de jeu et de grande taille dans les angines nécrotiques alors que les angines vésiculeuses ne donneront des petites lésions ulcérées après explosion des vésicules.
Description classique en ORL française, sa fréquence actuelle est difficile à estimer. C’était sans doute une atteinte de l’amygdale courante avant l’ère des antibiotiques mais qui aujourd’hui ne se rencontre qu’exceptionnellement sous forme d’angine.
C’est une infection nécrosante du pharynx classiquement dûe à l’association d’un bacille fusiforme du genre Fusobacterium necrophorum et d’un spirochète (Borrelia vincentii). Cependant certains auteurs considèrent que les spirochètes ne sont en fait que saprophytes et ne participent pas à l’infection. D’autres leur reconnaissent le rôle facteur aggravant en situation d’immunodépression de l’organisme.
Fusobacterium est apparenté à Bacteroides, il est responsable d’infections buccales variées parfois nécrotiques. On parle de maladie de Vincent pour des gingivostomatites ulcérées nécrosantes (acute necrotizing gingivitis ou trench mouth).
C’est aussi ce germe qu’on retrouve dans la stomatite gangréneuse qu’on appelle noma, ou cancrum oris qui se voyait en Europe dans des situations de grande dénutrition, et actuellement dans les pays pauvres.
La description classique de l’angine de Vincent la retrouve fréquente chez le sujet jeune à l’état dentaire précaire ou présentant une gingivite. Par contre elle est peu contagieuse.
Le début est insidieux avec état subfébrile (rarement plus de 38°C) mais asthénie intense.
Le patient se plaint de mal de gorge d’intensité croissante en odynophagie unilatérale avec céphalée.
Il ressent un mauvais goût dans la bouche, présente une hypersialorrhée et son haleine est fétide.
A l’examen, l’amygdale est modérément tuméfiée, non indurée. On note un ulcère unilatéral bien circonscrit, sur une amygdale, qui ne déborde pas sur les piliers ni sur le voile. La base de l’ulcère est grise, les contours sont irréguliers, les bords surélevés. L’ulcération est recouverte d’un enduit jaunâtre, friable, qui s’enlève facilement et saigne facilement quand on l’irrite.
Il peut y avoir une adénopathie sous mandibulaire homolatérale.
Un prélèvement de l’exsudat amygdalien observé au microscope après coloration de Gram met en évidence l’association bactérienne. Il n’y a pas réellement besoin de culture ou d’antibiogramme.
L’évolution est le plus souvent simple, l’ulcération persiste une dizaine de jours avant de disparaître. Il n’est pas classique qu’elle évolue vers un phlegmon amygdalien.
Le traitement est une antibiothérapie parentérale par pénicilline G, métronidazole ou clindamycine en cas d’allergie (résistance naturelle aux macrolides).
Si des lésions dentaires sont associées il faut les traiter pour éviter une récidive.
Rare, c’est une extension d’une angine de Vincent par emboles septiques en thrombophlébite de la veine jugulaire. Il existe un risque de sepsis grave et d’endocardite infectieuse.
Elle est l’apanage d’angine ulcéreuse ou de phlegmon amygdalien traitée de façon inadaptée par macrolides par exemple.
On la traite par céphalosporines de 3e génération.
Un chancre syphilitique au niveau amygdalien présente à peu près les mêmes caractéristiques qu’une angine fusospirillaire (pas complètement illogique puisque le Treponema pallidum est un spirochète).
L’atteinte est unilatérale mais l’ulcération est indurée et surtout elle n’est pas douloureuse.
L’adénopathie est plus volumineuse, ferme, avec un gros ganglion central et de plus petits autour.
Le prélèvement local peut avoir des difficultés à mettre en évidence le germe et la sérologie aux stades précoces est négative mais se positivera par la suite.
Dans les cas douteux avec une angine de Vincent, il faut la prélever avant le traitement par pénicilline.
D’autres IST peuvent donner de façon exceptionnelle des atteintes oropharyngées mais l’aspect est différent : angine vésiculeuse ou gingivostomatite de l’herpès, pharyngite gonococcique.
Une angine ulcéro-nécrosante peut être révélatrice d’une hémopathie, d’autant plus si elle est bilatérale. Les lésions ne sont pas forcément circonscrites à l’amygdale et peuvent déborder largement jusqu’à gagner la face interne des joues. Les lésions peuvent être purpuriques.
C’est la numération formule sanguine qui décèlera les anomalies hématologiques (leucémie, agranulocytose).
Au cours d’un épisode aigu, un diagnostic de cancer de l’amygdale ne peut être posé clairement, mais si l’ulcération persiste, et encore plus sur terrain alcoolo-tabagique, il faut envisager la possibilité tumorale.
Cas clinique : un étudiant en médecine de 20 ans 1ère partie exposé du cas et 2ème partie : diagnostic et discussion
ORL & Stomato, Angines, E. Cendan, C. Bodino, Impact internat
Eléments de pathologie infectieuse, S. Kernbaum, éditions SIMEP
Les angines bactériennes, présentation DES de bactériologie 2006, A. Allemand, J.P. Rasigade
Les angines bactériennes