thoracotomie

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Ambroise Paré, le père de la chirurgie moderne

Ambroise Pare

statue d’Ambroise Paré par David D’Angers de 1839

Souvent décrit comme le père de la chirurgie moderne, il a effectivement énormément contribué à l’apport médical via la chirurgie en particulier sur le plan traumatologie. Il est aussi célèbre car il n’était pas médecin de formation mais barbier-chirurgien et s’est opposé aux dogmes médicaux de l’époque. C’est une des grandes figures médicales de la fin de la Renaissance.

Biographie

On situe la naissance d’Ambroise Paré vers 1509 ou 1510 au Bourg-Hersent près de Laval en Mayenne. Il est fils d’agriculteur et artisan et eut 2 frères et 1 soeur. Son éducation est assez sommaire, avec notamment l’exploitation par le chapelain qui devait s’occuper de lui et qui l’utilisa comme domestique au lieu de lui enseigner le grec et le latin. Il exerce de petits travaux et entre comme apprenti chez le barbier du comte de Laval, puis à Angers et Vitré avec son frère lui-aussi barbier-chirurgien. On remarque à cette époque de l’adresse et de l’intelligence dans son travail.

En 1529, il entre à l’Hôtel-dieu comme compagnon chirurgien et se forme à la médecine et l’anatomie. Il aurait dit « ce n’est rien de feuilleter les livres, de gazouiller, de caqueter en chaire de la chirurgie, si la main ne met en usage ce que la raison ordonne ».Il devient maître barbier-chirurgien en 1536.

Il va participer à la médecine de guerre dès 1537 pendant la huitième guerre d’Italie, à la bataille du Pas de Suse. C’est là qu’il observe les souffrances des blessés du champ de bataille, par la blessure même mais aussi par les remèdes qu’on utilise à l’époque. Après cette campagne il rentre à Paris.

En 1543 il assiste au siège de Perpignan, occupée par les Espagnols, et continue d’élaborer des techniques chirurgicales novatrices. Avec le soutien du roi il publie la « Methode de traiter les plaies faites par les arquebuts et autres bastons à feu, et celles qui sont faites par la poudre à canon », puis un traité sur l’accouchement et l’anatomie.

Au cours d’autres interventions sur les champs de bataille, il innove dans les traitements des blessures par la ligature des vaisseaux plutôt que la cautérisation. Prisonnier au siège de Hesdin, il doit son salut aux traitements qu’il procure à l’occupant. Progressivement il entre au service du roi de Navarre puis d’Henri II roi de France et sa carrière sera alors toujours liée aux souverains.

Essayant d’obtenir une reconnaissance auprès des médecins de l’époque, malgré les oppositions il obtient le titre de docteur en chirurgie avec l’appui du roi en 1554.
Régulièrement employé pour les soins médicaux aux armées, il continue entre deux ses publications. En 1564 « Dix livres de la chirurgie : avec le magasin des instruments necessaires à icelle » utilise le mot bistouri pour la première fois (écrit bistorie au féminin, dans le texte).

En 1559 il prodigue avec Vésale des soins au roi Henri II, victime d’un accident de joute dont il décèdera.

On lui prête cette échange avec le roi de France Charles IX : « J’espère bien que tu vas mieux soigner les rois que les pauvres ?
– Non Sire, c’est impossible
– Et pourquoi ?
– Parce que je soigne les pauvres comme des rois »

Persécuté comme tous les protestants lors des guerres de religion, il échappe grâce à Charles IX au massacre de la Saint Barthelemy en 1572. Il reste premier chirurgien du roi auprès d’Henri III. Mais de son vivant, hormis cet épisode, ses oeuvres littéraires plus que sa personne furent critiquées.
La phrase « Je le pansai, Dieu le guérit » est en fait une contraction d’une citation un peu plus nuancée. A propos de soins apportés à un officier de la garnison, atteint d’une fracture du crâne, lors du siège de Metz en 1552 « … Il fut trépané à costé du muscle temporal, sur l’os coronal. Je le pensay avec autres Chirurgiens, et Dieu le guarit, et aujourd’hui est encore vivant, Dieu merci ».

Il meurt le 20 décembre 1590 à Paris, et reçoit de grandes funérailles à L’Eglise Saint André des Arts. On ignore ce qu’est devenu son corps à la destruction de l’Eglise en 1807.

Apports en médecine et chirurgie

Apport inestimable dans les plaies de guerre, les amputations puisqu’il donne la préférence à la ligature sur la cautérisation et la suppression de l’utilisation de l’huile bouillante. Il permet ainsi des amputations précoces, directement sur le champ de bataille, ce qui sauvera de nombreux blessés.
C’est devant l’afflux de blessés et par manque d’huile bouillante lors de la bataille du Pas de Suse qu’il va appliquer sur les plaies un mélange de sa composition avec du jaune d’oeuf, de l’huile de rosat et de la térébenthine et observera que les résultats ne sont pas plus mauvais et que les blessés ont moins de souffrances qu’avec l’huile bouillante. Il préconise l’extraction précoce du projectile lors des plaies par balles notamment, et le nettoyage soigneux de la plaie avec extraction de toutes les souillures et corps étrangers. Puis l’application d’onguents divers et le pansement de la plaie.
Pour autant père de la chirurgie militaire, il portera un regard désabusé sur la folie des hommes qui perfectionnent sans cesse les armes, qui figurera en introduction aux dernières éditions de son traité des plaies d’arquebuses.
Ses idées malheureusement ne furent pas mis en application tout de suite et les tenants de la théorie de la vénénosité des balles, les partisans de la cautérisation étaient encore nombreux au XVIème voire au début du XVIIème siècle.

Dans la continuité des handicaps causés par les amputations, il a inventé un certain nombre de prothèses métalliques articulées. Il fait aussi une des premières observations de cicatrisation de certaines plaies par asticothérapie.
Paré a également amélioré le traitement de la lithiase urinaire (« la pierre ») en empruntant à Pierre Franco. Mais peu de réelles découvertes chirurgicales.
En anatomie, il s’oppose sur quelques descriptions à l’autre grande figure de l’époque qu’est André Vésale.

Il est aussi l’auteur d’un assez curieux livre « Des monstres et prodiges « avec beaucoup de descriptions assez #WTF.

Le fait qu’il ait publié ses livres en français (avec le soutien des rois quand même) par rapport aux publications classiques en latin, a contribué d’une certaine façon au développement du savoir médical.

Une question très bête que je me suis toujours posé : le terme de parage chirurgical est il une adaptation du nom d’Ambroise Paré ? (ou est ce mon cerveau « débridé » qu’il vaudrait mieux parer …).

Quelques oeuvres représentant Ambroise Paré :

C’est assez amusant de constater qu’à part la barbe, aucun des Paré représentés ne se ressemble !

Ambroise Paré par James Bertrand

Théobald Chartran : Paré pratiquant la ligature sur un blessé au siège de Metz

Chartran a aussi représenté René Laënnec auscultant ses patients.

Paré et la blessure du roi Henri II sur le site de la BIU Santé Paris Descartes, et une gravure portrait

gravure portrait d’Ambroise Paré

Références

Wikipedia, Ambroise Paré

Comité d’Histoire du Service de Santé, Histoire de la médecine aux Armées, Tome 1 de l’Antiquité à la Révolution, éditions Lavauzelle

Ambroise Paré and the birth of gentle art surgery

site sur le vieil Hesdin à propos du siège de la ville, avec le récit d’Ambroise Paré

Oeuvres 1585 à consulter en Flash (ne fonctionne pas sur tous mobiles et tablettes)

Les oeuvres complètes disponibles en différentes version sur Gallica

Traité de la peste et de la petite verolle & rougeolle, avec une briesque description de la Lepre

Illustrations en rapport avec Ambroise Paré sur le site de la BIU Santé Paris Descartes

« Main de fer » prothèse

Ca c’est pour @SophieSageFemme du blog Liberté, Egalité, Maternité :

« pessaire pour tenir le col de la matrice ouvert, par le bénéfice d’un ressort » et non pas d’un effort comme on pourrait le lire à cause de leurs maudits SF (et non pas maudites S.F.)

et parmi les illustrations sur « Des Monstres et prodiges »

« Des monstres et prodiges », par Ambroise Paré

6 commentaires sur “Ambroise Paré, le père de la chirurgie moderne

  1. mimiryudo
    8 novembre 2013

    Des monstres et prodiges a l’air très tentant 😀

    J’ai relevé une coquille :  » Charles IX II ». A moins que ça ne soit Charles-du-92, un roi méconnu de la cité.

    Dans le Littré, parage fait référence à « l’ajustage des pièces métalliques, qui a pour but de redresser les surfaces » et serait un dérivé de « paries » en latin (la paroi).

    En tout cas, c’est un excellent post pour fêter le 200ème ! J’aime beaucoup les nombreuses citations qui ponctuent ce billet 🙂

    • thoracotomie
      10 novembre 2013

      Monstres et prodiges, ça casse un peu le mythe du super médecin.
      En même c’était qu’un chirurgien après tout, fallait pas trop lui en demander …

  2. Jacques Brélivet
    22 décembre 2013

    Dans la bibliographie, ajoutez le très beau livre de Jean-Michel Delacomptée « Ambroise Paré, la main savante » paru chez Gallimard il y a queqlues années et qui est toujours disponible en librairie.
    J. Brélivet

  3. Isabelle
    18 Mai 2015

    Ligne 5 de la partie Biographie : ne faudrait il pas écrire le Comte de Laval (au lieu du compte…)

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