C’est une fracture assez évidente à diagnostiquer, un peu moins à traiter en ce qui concerne les options thérapeutiques. Elle peut résulter de traumatismes directs comme un impact sur le bras, un accident de la voie publique, lésion balistique mais aussi indirects comme une chute avec réception sur le coude, la paume de la main. Des fractures ont été décrites par une contraction musculaire importante au cours de crises convulsives.
La configuration d’une diaphyse d’un os (la partie moyenne, la plus étendue d’un os long) fait qu’en cas de fracture faisant suite à un traumatisme important, le déplacement est quasi obligatoire. On peut imaginer des fractures diaphysaires humérales qui sont très peu déplacées quand l’os est malade et que la fracture est pathologique (ostéoporose avancée, métastase osseuse, …).
Dans la plupart des cas, donc, la fracture est visible par une déformation conséquente du bras, soit un volumineux hématome qui crée une tuméfaction dure, soit une angulation anormale. Si la fracture a déjà quelques heures, on peut voir la diffusion sous la peau d’une ecchymose. L’impotence fonctionnelle est totale. On perçoit une crépitation ou un frottement ainsi qu’une mobilité anormale dans le bras. Peu de doute diagnostique avec une fracture de la tête humérale. Il faut vérifier d’une part l’absence d’ischémie à l’avant-bras et la main qui témoignerait d’une lésion de l’artère humérale, et d’autre part l’absence de paralysie radiale des releveurs du poignet et des doigts. La lésion du nerf radial se voit dans 5 à 10% de ces fractures. Elle n’est que rarement due à un cisaillement du nerf et est plus souvent due à une contusion ou un étirement du nerf qui récupèrera lentement mais sans séquelles. Au tiers distal quand le trait est spiroïde, la fracture porte le nom de fracture d’Holstein-Lewis et s’associe souvent à une lésion du nerf radial.
La radiographie précise le niveau (tiers ou quart proximal, tiers ou 2/4 moyen et tiers ou quart distal selon les auteurs) et le trait de fracture (horizontal, transversal, spiroïde, …), le nombre de fragments (3e fragment en «aile de papillon»), le déplacement en raccourcissement, angulation ou rotation. Elle doit explorer l’épaule et le coude à la recherche d’autres fractures. Les déplacements se font sous l’influence des attaches musculaires : au tiers proximal le fragment supérieur se déplace en rotation et abduction sous la traction de la coiffe des rotateurs alors que le fragment inférieur se déplace en adduction sous l’action du grand pectoral. Dans une fracture du tiers inférieur, le fragment inférieur se déplace en abduction. Un trait de fracture entre les insertions du deltoïde et du grand pectoral peut amener un déplacement du fragment supérieur en adduction.
fracture diaphysaire haute de l’humérus, en apparence peu déplacée mais nécessitant une ostéosynthèse
Utilisée pour les fractures sur les diaphyses des os longs, applicable aussi à l’humérus.
Intéressante aussi pour le suivi des douleurs et oedèmes post-opératoires, notamment en cas de suspicion de thrombose veineuse au membre supérieur ou de lésion du nerf radial.
thrombose veineuse brachiale après réduction et immobilisation d’une fracture diaphysaire basse chez un patient déjà porteur d’un clou centromédullaire huméral
nerf radial (grande flèche) directement au contact de la plaque d’ostéosynthèse (3 têtes de flèches) dans une fracture diaphysaire humérale
En apparence cette fracture donne un aspect de gravité particulier qui pousserait à choisir une solution chirurgicale dans la majorité des cas. Si la réduction anatomique de la fracture est évidemment à réaliser (au mieux sous anesthésie), la fixation chirurgicale est loin d’être la règle même si certains chirurgiens sont en faveur d’une intervention systématique pour permettre une mobilisation précoce. Le traitement de ces fractures vise avant tout la récupération de la fonction du membre supérieur. Une petite déformation résiduelle est tolérable et ne sera visible que sur la radiographie et n’aura pas de conséquences fonctionnelles. Le délai de consolidation de la diaphyse humérale est entre 60 à 90 jours chez l’adulte, 60 chez l’enfant pour une fracture transversale ; pour une fracture spiroïde plutôt 90 jours chez l’adulte, mais 45 chez l’enfant.
Les indications chirurgicales regroupent les fractures ouvertes, les fractures multi-fragmentaires ou comminutives, les fractures associées à une lésion vasculaire, les déplacements irréductibles ou très instables à la réduction, les fractures pathologiques, les défauts de consolidation et certaines fractures «orthopédiques» mais inscrites dans un polytraumatisme. Dans la plupart des cas, les fractures diaphysaires peuvent souvent se traiter par immobilisation. D’une part pour éviter le risque anesthésique et le risque opératoire, mais aussi parce que la technique chirurgicale d’ostéosynthèse qui a la meilleure balance bénéfices-risques est toujours discutée. Il semblerait que la fixation par plaque vissée donne les meilleurs résultats comparé aux clous centromédullaires et à l’embrochage fasciculé.
Les patients qui présentent une paralysie radiale nécessitent une exploration chirurgicale, mais il n’y aura le plus souvent pas de geste fait sur le nerf lui-même, simplement la fixation de la fracture. Cette attitude vaut aussi pour les patients qui ne présentaient pas de déficit neurologique radial à leur arrivée mais qui développent une paralysie ou une parésie secondairement (prise du nerf dans le cal osseux). L’EMG (électromyogramme) en urgence n’a pas d’intérêt mais peut être réalisé à partir de 3 semaines pour suivre l’évolution du déficit qui normalement régresse en quelques semaines.
scanner en coupe sagittale, absence de consolidation de la fracture diaphysaire sur clou centromédullaire
Le traitement orthopédique «à l’ancienne» perd de son intérêt au profit d’un traitement fonctionnel ou du moins pour la seconde phase du traitement après une immobilisation orthopédique la plus courte possible, passées les plus grandes douleurs. L’immobilisation initiale la plus simple et la moins spécifique de ces fractures peut reposer sur le port d’une écharpe contre-écharpe d’immobilisation du membre supérieur. Néanmoins il n’est pas souhaitable qu’elle soit gardée trop longtemps pour éviter l’enraidissement articulaire de l’épaule et du coude. Les bandages type Dujarrier ne sont pas une bonne solution dans ce type de fractures car on ne contrôle pas la réduction, ils sont aussi moins bien tolérés sur le plan douleurs que les écharpes amovibles. Même en cas de choix de traitement orthopédique/fonctionnel, l’hospitalisation est parfois nécessaire en fonction du terrain et de l’autonomie des patients et du fait de la douleur initiale de ces fractures.
Dès la diminution des douleurs, l’adaptation de l’immobilisation est souhaitable avec des attelles (functionnal brace) ou plâtre ou orthèse moulée de Sarmiento qui ont un effet rassurant pour le malade en entourant le foyer de fracture, ne sont pas compressifs et laissent libre l’épaule et le coude. Une écharpe simple tenant le poignet et passée autour du cou complète le montage. On retire ce type de système dès la formation du cal de consolidation (6 à 9 semaines). La rééducation est alors commencée activement.
Un traitement orthopédique plus classique existe sous forme de plâtre pendant, c’est à dire une immobilisation type plâtre brachio-antébrachiopalmaire immobilisant le coude et le poignet mais qui ne comprend pas le foyer de fracture. Au niveau de l’olécrâne au coude, le plâtre comporte un anneau auquel on attache un poids. Par cette traction, la fracture tend à se réduire naturellement, on peut donc l’utiliser en première intention sur une fracture peu déplacée. Il ne « fonctionne » qu’en position assise ou debout, si le patient doit être alité on peut installer un système de traction dans l’axe de l’humérus et dans le plan du lit. On conseille dès la disparition des douleurs, la réalisation de mouvements pendulaires contre l’apesanteur. Il est rarement gardé jusqu’au bout et est généralement changé à 30 jours pour une attelle thermoformée ou une résine.
Le meilleur traitement entre les 2 techniques reste discuté. La première comporte un risque de déplacement, et la seconde d’absence de consolidation. Le coût et la simplicité de mise en place n’est pas le même non plus, le plâtre pendant étant très simple à réaliser alors que les attelles pour être adaptées doivent être moulés sur le bras du patient. Les attelles d’abduction ne sont plus utilisées dans cette indication. La surveillance initiale des traitements non opératoires est impérative pour dépister les oedèmes compressifs et le déplacement secondaire des fragments.
La rééducation est à commencer dès que possible, dès la diminution des douleurs, passivement puis activement à l’ablation des dispositifs d’immobilisation.
Les pseudarthroses se voient après traitement chirurgical ou orthopédique et nécessitent une reprise chirurgicale.
A différencier chez le petit enfant avec les fractures de la palette humérale.
Sur tumeur osseusse bénigne ou maligne ou sur métastase, ostéopénie, ostéoporose …
Saragaglia D, Fractures du coude de l ’adulte, Traumatologie à l ’usage de l ’urgentiste, Sauramps medical
Meyer F, Upper extremity and hand injury, Trauma Moore Feliciano Mattox, McGraw Hill editions
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sur ISPUB : attelle fonctionnelle chez le sujet âgé Treatment Of Humeral Diaphyseal Fractures In Elderly Using Functional Brace
Humeral shaft fracture , Radiopaedia
A funny fracture , Life in the fast lane