thoracotomie

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Plaie cervicale superficielle

plaie cervicale superficielle

plaie cervicale superficielle : fragments de balle extraite du cou, trajet sous-cutanée tangentiel, lame de drainage en place

Comme toute région anatomique, le cou peut être le siège de plaies de différentes natures et schématisables en plaies superficielles et plaies profondes.
Néanmoins s’il est riche en structures et éléments nobles, il n’y a pas de squelette externe qui le protègerait et absorberait une partie des chocs (ceci dit la voûte crânienne et la cage thoracique jouent parfois de facteur aggravant au lieu de protecteur quand c’est une plaie par projectile).
Le cou a des éléments musculaires, vasculaires, nerveux, un squelette profond, un peu comme un membre, sauf que toute lésion grave engage le pronostic parce qu’une lésion de la moelle cervicale au-dessus de C4 entrainera la paralysie du diaphragme et la mort par asphyxie. Les nombreux vaisseaux dont ceux de gros calibres comme les carotides, jugulaires, vertébrales font qu’une entaille importante entraine des hémorragies cataclysmiques.

Ceci sans compter des lésions mutilantes sur les nombreuses ramifications nerveuses du plexus cervical et brachial, des nerfs vague, du sympathique cervical, de la glande thyroïde.

Tout ceci pour dire que si les plaies cervicales superficielles existent bien, le risque de lésions sous-jacentes fait qu’on ne considère pas ces plaies comme véritablement superficielles, et en tous cas pas bénignes. Ce sont des plaies qu’on prend en charge comme des plaies profondes et dont on conclut de la simplicité par l’assurance d’aucune lésion grave.

Il serait difficile de donner des statistiques précises du nombre de blessés du cou, en milieu civil ils sont rares, en milieu militaire ils ne sont pas très fréquents car la violence des conflits entraîne souvent des lésions profondes létales.

Mais les quelques blessés qui arrivent en vie doivent être examinés attentivement en salle d’urgence (au poste de secours sur un terrain de guerre), et la plupart du temps dirigés vers un bloc opératoire pour une exploration complète.
L’atteinte par arme blanche si elle est portée maladroitement a une chance de ne pas s’enfoncer profondément dans le cou mais de le lacérer en coup de taille. Portée par derrière, même en s’enfoncant directement, une lame peut se coincer dans les masses musculaires de la nuque et ne pas créer trop de dégâts.En milieu civil, très peu de traumatismes vont donner des plaies à la hauteur du cou. Les chutes entrainent des lésions crâniennes mais pas cervicales, de même que des objets tombant d’une certaine hauteur atterrissent exceptionnellement sur le cou. Il reste donc les atteintes directes quasiment toujours intentionnelles, par équivalent d’arme blanche ou par projectiles (balle et éclats).
En milieu militaire, les lésions sont avant tout des plaies par balles et du polycriblage.
Au final ces plaies sont des plaies «accidentelles» mais avec une intention certaine de nuire. Mais l’objectif visé n’a pas été atteint, le coup ayant été dévié.

Sur le côté, le muscle sterno-cleïdo-mastoïdien n’est pas assez épais pour autoriser la pénétration d’une lame sur plusieurs centimètres sans dommages graves, la présence de l’axe carotido-jugulaire aggrave aussi ces atteintes.
L’atteinte de face crée toujours une lésion sévère, soit en percant la glande thyroïde qui est très richement vascularisée, soit en traversant la trachée ou le larynx.

Le trajet d’une balle peut être reconstitué mentalement mais il y a des déviations de trajectoires,.Les éclats de grenade, de bombes artisanales ou de métal par explosion d’un véhicule à distance ont une trajectoire quasi impossible à décrire, et il y a souvent plusieurs éclats, mais la force est moins puissante que pour une balle. Dans les lésions balistiques, il y a malheureusement beaucoup de chances que des lésions d’autres organes soient observées. Le polycriblage (plaies par multiples fragments) peut être uniquement superficiel mais il tient sa difficulté de traitement par la multiplication de plaies souillées superficielles.

On voit donc qu’il y a peu de chances qu’une plaie cervicale constatée soit strictement limitée à la peau, mais elle peut avoir traversé le fascia cervical et s’arrêter dans un muscle en arrière et sur les côtés. De face, le tableau est toujours une détresse respiratoire.

Il faudra se méfier d’une atteinte paraissant simple qui s’aggrave progressivement avec le développement d’un hématome cervical qui devient compressif sur les structures internes.

Si le blessé qui arrive est stable, il est logique de faire un minimum d’examens complémentaires pour s’assurer avant le bloc qu’il n’y a pas d’autres atteintes. Outre le bilan biologique, ECG, radiographie de thorax, c’est un scanner qui semble logique, mais en cas de doute sur une atteinte vasculaire profonde, on peut aller jusqu’à l’artériographie.
L’échographie des parties molles pour localiser des corps étrangers est intéressante mais pas assez sécurisante dans ce contexte.

Si toute l’imagerie est normale, la plaie peut être parée et suturée, puisqu’en général il n’y a pas de perte de substance dans les situations que l’on a décrit.

Cette suture n’a rien de particulier, au fil non résorbable, à points séparés ou surjet, voire par agrafes selon les habitudes du chirurgien. Si le fascia et le muscle sont entamés, quelques points profonds simples suffisent.
Les corps étrangers inclus dans la plaie doivent être retirés scrupuleusement pour ne pas laisser de matériel propice à une infection de plaie. Infection toujours facile car ces plaies sont souvent souillées. Or une brèche minime dans le fascia cervical ferait communiquer une fasciite locale au thorax en une médiastinite de sombre pronostic. Un drainage de la plaie parait assez logique, dans le cadre de plaie superficielle, une lame ou des crins de Florence peuvent suffire.

Un corps étranger qui serait oublié pourrait également progressivement creuser son chemin dans les tissus, et entrainer des lésions vasculaires ou nerveuses par irritation longtemps après la blessure initiale.

Le cas clinique qui a servi pour l’illustration de cet article est une plaie par balle qui s’est fragmentée lors de la pénétration dans la peau, dont la trajectoire était assez tangentielle à la peau. L’orifice d’entrée est antérieur, l’orifice de sortie est postéro-latéral plus étendu avec une sorte de brûlure des téguments. Il représente bien ces plaies rares mais possiblement observables sur des blessés qui ont eu de la chance, à quelques centimètres près la blessure était mortelle.

En conclusion :

  • une plaie au cou même suspectée d’être superficielle doit être envisagée comme profonde jusqu’à preuve du contraire
  • reconsidérées comme des plaies bénignes, elles n’en restent pas moins très septiques, il faut les draîner
  • en cas de criblage, toujours vérifier les autres atteintes même à distance

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